Tableau de l’état physique et moral des ouvriers employés dans les manufactures de coton, de laine et de soie. (EXEMPLAIRE DE GUSTAVE DE BEAUMONT)

Édition originale de cet ouvrage, qualifié de “l’un des grands livres sociaux du XIXe siècle” (cf. M. Leroy, ‘Histoire des idées sociales en France’, II, p. 381-390), et considéré comme une étape décisive dans l’histoire du développement de la sociologie, de la démographie et de la statistique sociale en France. Médecin hygiéniste, R.-L. Villermé fut mandaté par l’Académie des Sciences morales et politiques pour “constater aussi exactement que possible, l’état physique et moral des classes ouvrières”. Son enquête à travers la misère ouvrière débuta à Mulhouse, puis se poursuivit dans le Haut-Rhin. Construit sur un travail de terrain minutieux, exposé en un style sobre et objectif, il décrit la condition des ouvriers, l’exploitation des femmes et des enfants, ainsi que les réalités du travail et de la vie quotidienne de ceux qu’il désigne comme les “nègres blancs”. L’impact de cette enquête fut d’autant plus retentissant que les faits y étaient exposés avec une rigueur scientifique et analysés dans une optique libérale. Son rapport joua un rôle déterminant dans l’élaboration de la loi du 22 mars 1841 sur le travail des enfants. Par la qualité et la profondeur de ses recherches, ce “tableau” ouvrit la voie à une réflexion majeure sur la condition ouvrière, suscitant de nombreux travaux ultérieurs et contribuant aux grandes réformes sociales qui suivirent. (En Français dans le Texte, 256. Dada, 292. Einaudi, 5914. Goldsmiths, 31731. Kress, C.5352. M. Perrot, ‘Enquêtes sur la condition ouvrière’, 63). Précieux exemplaire provenant de la bibliothèque de Gustave de Beaumont, comportant sa signature autographe sur la première garde blanche ainsi que quelques marques de lecture à la plume de sa main. Député, diplomate et membre de l’Institut, G. de Beaumont (1802-1866) fut un proche collaborateur de Tocqueville avec qui il voyagea aux États-Unis. Bien de formations différentes et ne parvenant pas toujours aux mêmes conclusions, R.-L. Villermé et G. de Beaumont partageaient, en véritables précurseurs de la sociologie, un même intérêt pour l’étude des conditions sociales et économiques de leur époque, mettant particulièrement en lumière les inégalités et les injustices sociales. Bel exemplaire, très frais, parfaitement conservé dans sa première reliure romantique.